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Rencontre avec
Marie-France
Millasson

 
 

Rodolphe Haener

Marie-France Millasson, quand et comment avez-vous débuté la photographie ?

Après l’école obligatoire. J’ai entamé un apprentissage d’employée spécialisée en photographie (ndlr : aujourd’hui technicienne en photographie) dans un magasin de photographie à Vevey et Montreux, durant trois ans.

Pourtant, vous avez grandi à Châtel-saint-Denis, dans le canton de Fribourg.

Oui, mais mon tempérament et mes envies de liberté m’ont poussée à quitter la maison à 16 ans. J’avais le désir de vivre ma vie et de m’amuser.

Au départ, vous vouliez pourtant faire de la bande-dessinée ?

C’est juste. Je rêvais de partir étudier à Bruxelles. J’adorais dessiner. Mais la réalité ne l’a pas permis. La photo est alors arrivée au moment opportun.

Qu’avez-vous appris durant votre apprentissage ?

D’un côté, les techniques photographiques comme la prise de vue et le développement des films en laboratoire. Nous utilisions alors l’argentique. J’ai également appris à bien connaître les spécificités du matériel existant, de sorte à pouvoir conseiller la clientèle.

Vous partez ensuite au CHUV, à Lausanne.

J’y ai fait des prises de vue en salle d’opération. Des photographies de patients, également. Parfois des choses moins drôles, comme des fœtus morts. C’était le métier.

Plus tard, à l’Hôpital ophtalmique, vous produisez d’autres types de photographies médicales…

Des angiographies. Il s’agissait d’injecter dans les artères des liquides – fluorescéine – pour constater les bouchures dans les veines de l’œil. Les zones altérées ainsi localisées, le médecin pouvait agir.

A ce moment de votre vie, vous bifurquez…

J’ai mis la pratique professionnelle de la photographie de côté pour tenter de nouvelles expériences. Il y en a eu beaucoup. Peintres en lettres, secrétaire dans une agence de placement, employée de back-office pour des courtiers en bourse, « bouèbe », à savoir « garçon de chalet » gardant les vaches durant l’été. J’ai également appris à faire du fromage. Puis j’ai travaillé dans la restauration sur un alpage du domaine des Portes-du-Soleil en tant que gérante d’un restaurant pendant deux étés. Puis j’ai suivi des études de marketing et repris des études bancaires, ce qui m’a emmené dans les banques en tant que responsable marketing.

Avant cela, vous aviez également créé une entreprise de petites annonces de revente de voitures entre particuliers.

Oui, l’idée était excellente. Il suffit de regarder aujourd’hui le succès des plateformes internet dédiées à cette activité. Seulement, je suis arrivée trop tôt sur le marché. A l’époque, ça n’a pas pris.

Et puis soudain, la photographie est revenue dans votre vie…

Alors que j’étais responsable marketing dans une banque, j’organisais diverses expositions de photographies dans nos murs, notamment pour attirer une nouvelle clientèle. Un jour de 2013, j’ai rencontré un photographe animalier et il m’a parlé de la photo avec tellement d’amour… Droit derrière, j’ai racheté un appareil. Une amie à moi, cheffe d’entreprise, m’a confié un premier mandat. Puis un second. Et tout s’est enchaîné. En 2016, je suis devenue entièrement indépendante.

Entre vos premières années de photographe et votre retour, tout a changé…

Quand je suis revenue à la photographie, le monde était passé de l’argentique au numérique. Pour bien comprendre ces changements, je n’ai eu de cesse de poursuivre ma formation : à Paris pour la photographie d’aliments ou la maîtrise du flash ; à New-York récemment pour assimiler la technique du Light-Painting (lire ici). Par ailleurs, je fais évoluer mon travail en regardant celui des autres photographes.

D’un côté, donc, votre travail professionnel, mêlant tant la photographie de sujets architecturaux, qu’industriels ou alimentaires. Sans oublier les portraits. De l’autre, vos séries artistiques personnelles.

Je mets évidemment autant de soins dans mes travaux professionnels que dans mes œuvres. La différence, naturellement, c’est que je photographie ce que je souhaite dans mes travaux personnels.

Avec des exigences différentes dans vos travaux artistiques ?

Disons que si je suis perfectionniste dans tout ce que j’entreprends, j’arrive à saisir rapidement les demandes de mes clients et les restituer. Au contraire de mes œuvres, pour lesquelles je suis toujours insatisfaite.

Dans vos œuvres, justement, on trouve des travaux aussi variés que des gros plans de plantes, des instantanés sur le mouvement…

Et bien d’autres choses encore. Mon papa m’a transmis le goût de l’observation de la nature et de la lenteur, apparente, des processus. Mon goût du voyage m’a montré les grandes structures de mobilité, faisant naître une fascination mêlée d’aversion pour la vitesse et la société moderne.